vendredi 2 juillet 2010

Amélie Debaye présente son premier roman. Dans Les Sœurs Fernig, elle retrace l’épopée de deux héroïnes de la Révolution.

Amélie Debaye vit à Escautpont. Le 18 juin, nous avons rendez-vous sur la place d’Armes à Valenciennes. Une date et un lieu de circonstance. Dans un café, nous évoquons son roman, Les Sœurs Fernig, consacré à deux jeunes Nordistes qui prirent les armes pour résister à l'oppression durant la révolution française.
Amélie Debaye est très attachée au Nord. Elle n’apprécie pas l’image que trop souvent les gens en ont. Dans ce livre, elle montre que « l’histoire de la région ne s’arrête pas à Germinal ».
L'histoire. En 1792, trois ans après la prise de la Bastille, l’armée autrichienne est aux frontières. Dans ses rangs, les royalistes français qui ont fui le pays rêvent de rétablir la monarchie et leurs privilèges. Les citoyens prennent les armes pour résister. Près de Valenciennes, les accrochages avec l’ennemi sont nombreux. Deux adolescentes de Mortagne-du-Nord, Félicité et Théophile Fernig, se déguisent en homme pour pouvoir participer aux combats. Bientôt, elles se font remarquer par leur témérité. Des frontières du Nord à la bataille de Valmy, elles iront jusqu’au bout.

Amélie Debaye, comment l’idée de ce livre vous est-elle venue ?
« J’aime beaucoup l’histoire et surtout l’histoire de la région. C’est dans un petit paragraphe du livre de Raymond Durut, Bruay-sur-l’Escaut à travers douze siècle d’histoire que j’ai entendu pour la première fois parler des sœurs Fernig. Mon grand-père est de Mortagne comme elles. On aimait beaucoup aller là-bas et je ne savais pas qu’elles existaient. C’est de là qu’est venu mon intérêt. En plus, c’était des femmes-soldats... Elles ont eu un destin extraordinaire et j’avais envie de le raconter. »

Vous avez dû faire un véritable travail d’historienne, non ?
« Oui, j’ai fait des recherches avec le Cercle historique de Mortagne, dans les livres d’histoire, dans les archives du Nord, dans celles de Valenciennes aussi... Mais comme ça m’intéresse vraiment, pour moi, ce n'est pas du travail. Aller aux archives, j’adore ça, lire, j’adore ça. »

Qu’est-ce que vous aimez lire ?
« J’aime beaucoup Alexandre Dumas. Les auteurs du XIXe... Les auteurs historiques également... En fait, je me reconnais plus dans le XIXe siècle que dans l’époque actuelle. Mon livre de chevet, c’est Le Comte de Monte-Cristo. Si ma maison devait brûler, j’emporterais ce livre. »

Le roman historique mêle des faits réels et des faits imaginaires. Dans quelle mesure avez-vous romancé ?
« Les grands faits historiques y sont, mais c’est vrai que pour la vie de tous les jours, c’était difficile. Il fallait les imaginer dans leur époque. Mais je ne pense pas non plus qu’il y ait une grande différence avec aujourd’hui. Je pense c’était des gens qui vivaient comme nous. Les historiens parlent de faits historiques, auxquels ils n'ont pas assisté. C’est toujours une interprétation. »

Vous dites qu'elles vivaient comme nous, mais elles avaient une énergie que nous n’avons pas...
« C’était l’époque. La Révolution pour beaucoup de gens, c’est Robespierre, la guillotine, mais ce n’est pas que ça. Il faut rendre hommage à cette génération qui voulait changer les choses. Il fallait voir ce que c’était avant : les impôts, les privilèges, etc. Je pense qu’on l’oublie un peu facilement. »

On a l’impression que les sœurs Fernig obéissaient à une force qui les dépassait. Félicité, l'aînée, dit d’ailleurs que « ses jambes n’avaient pas besoin de sa tête pour avancer »...
« C’était le mouvement général de la Révolution. Il y a eu en masse des jeunes qui sont partis se battre. Le mot Liberté, aujourd’hui on a oublié ce qu’il voulait dire, mais à cette époque-là, il façonnait. »

Est-ce que cet élan irrésistible ne leur a pas également joué des tours ?
« À cette période, tout bougeait très vite. Elles étaient proche du général Dumouriez. C’était comme un père pour elles. Elles l'ont suivi sans réfléchir. Elles n’ont pas réalisé tout de suite ce qu’elles faisaient... On parle de la trahison de Dumouriez, mais moi, je ne vois pas ça comme une trahison. »

Les Autrichiens les imaginaient comme des sorcières...
« Oui, elles faisaient peur. Même après, quand elles ont voulu revenir à Mortagne, les Français n’ont pas voulu d’elles, parce qu’ils avaient peur de l’influence qu’elles pourraient avoir dans l'armée. »

Elles étaient femmes-soldats, étaient-elles aussi des suffragettes ?
« On va dire qu'elles ont été élevées un peu plus librement que les filles de l’époque. Elles ont pris les armes en même temps que les hommes. Pour elles, je pense qu’il n’y avait pas de différence entre être un homme et une femme. Il fallait y aller. Elles étaient pour l’égalité.»

Recueilli par Sébastien Arnold
Interview publiée en partie dans Croix du Nord le 09/07/2010.


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